samedi 16 mars 2013

Au plaisir de ne pas vous revoir, docteure

Deux petites salles à l'urgence occupées par deux femmes. Une est jeune et souffre de détresse respiratoire, l'autre est vieille et souffre également de détresse respiratoire. La plus jeune des deux est arrivée aux urgences après la plus vieille.
Le temps passe et l'état physique de la plus âgée n'est pas évalué. Pendant le temps d'attente, la médecin de garde à l'urgence arrête un instant sur le pas de la porte de la salle de la jeune femme pour lui annoncer qu'elle n'a pas de pneumonie, mais que puisque ses signes vitaux sont anormaux, on lui administrera un médicament qui dégagera ses poumons. Dans la salle d'à côté, la femme âgée attend toujours. Le moindre respir produit un son sibilant alarmant et un gargouillis. On s'affaire dans la salle de la jeune femme.
Finalement, la médecin se présente dans la salle de la femme âgée et s'adresse à la personne qui l'accompagne. «Encore à l'urgence?» dit-elle. Devant le regard expressif de l'accompagnatrice, elle se reprend «mais non, je ne veux pas dire que vous n'avez pas le droit d'être ici»... ça augure mal.
En fait, la docteure explique que de traiter cette dame âgée représente pour elle de l'acharnement thérapeutique, et qu'il s'agit là d'une notion toute subjective. Elle ajoute que sur le plan médical, la personne qui accompagne la malade ne connaît pas tout. L'idée vient à l'accompagnatrice qu'il s'agit de la médecin qui a traité la malade il y a à peine deux semaines et qui ne connaissait pas assez bien les médicaments pour savoir qu'un des médicaments que prenait la patiente était susceptible de provoquer une déshydratation. Cette hypothèse a été avérée plus tard par le neurologue qui a ajusté la dose du médicament. Mais elle obtempère, pour tenter de ramener le débat sur l'essentiel... le bien-être de la patiente. Elle aurait pu engager l'échange sur un terrain qu'elle connaît bien en tant que juriste, mais là n'était pas la question. Il faut contenir les dégâts.
Acharnement thérapeutique, âgisme... des notions bien élastiques quand on ne prend pas le temps de bien y réfléchir et d'y réfléchir d'une façon intelligente et objective, en toute connaissance de cause.
La  Commission spéciale de l'Assemblée nationale du Québec sur la question de mourir dans la dignité proposait en 2011 la définition suivante d'acharnement thérapeutique : «recours à des traitements intensifs dans le but de prolonger la vie d'une personne malade au stade terminal, sans espoir réel d'améliorer son état.» N'en déplaise à cette médecin, la notion d'acharnement thérapeutique n'est pas une notion subjective, il s'agit d'une notion juridique qui sert à encadrer une obligation réelle, l'obligation qu'a le soignant de prendre les moyens nécessaires pour soigner le malade.
Une pneumonie non traitée peut entraîner la mort et elle peut même être fatale lorsqu'elle est soignée. Dans tous les cas, la pneumonie est porteuse de souffrance physique. Le résultat positif du traitement est hors du contrôle du médecin et c'est pourquoi il n'est pas accablé d'une obligation de résultat. L'issue du traitement relève de ce que l'on pourrait appeler «le mystère de la vie». Pourquoi un patient survit-il, pourquoi l'autre décède-t-il? C'est une question de destin personnel.
La patiente est âgée, souffre de troubles cognitifs et dépend des autres pour les activités de la vie courante, trois éléments qui sont confrontants pour chacun d'entre nous. La médecin est jeune, elle semble tirer orgueil de son apparence physique, elle oeuvre dans le milieu de la médecine esthétique, elle publie une vidéo sur YouTube sur comment préserver l'apparence de la jeunesse... cette femme âgée vient la troubler au plus profond d'elle-même. Elle la confronte à ses craintes et ses faiblesses. On perçoit facilement que la patiente a été belle dans sa jeunesse - pas simplement jolie comme la médecin, mais franchement belle. La médecin entrevoit ici son avenir éventuel. Quant à la dépendance aux autres, pour plusieurs elle équivaut à une perte de dignité humaine. Cette vision des choses est fausse et nie la réalité fondamentale de l'existence. Sans l'Autre, nous ne naissons pas et par conséquent, nous n'existons pas. La vie se tisse de liens avec l'Autre. Sans l'Autre, nous nous trouverions dans un coma existentiel perpétuel. La dignité de l'être humain est une qualité inhérente à l'être humain. Elle peut être reconnue ou non par l'Autre, mais l'Autre ne peut pas la dérober à autrui, au risque de nier sa propre dignité humaine.
En contrepartie d'une signature apposée sur un formulaire acceptant les modalités du code d'intervention thérapeutique 2 de l'OMS (niveau palliatif réservé aux malades au stade terminal d'une maladie mortelle), la médecin prescrit l'antibiotique de rigueur lorsqu'un patient est atteint de pneumonie. Elle a accepté de faire prendre la radiographie diagnostique qui a confirmé la pneumonie. Elle renvoie la patiente à la maison sans procéder à la succion du mucus dans la gorge, sans intervention thérapeutique d'un inhalothérapeute et sans soulager la patiente de son inconfort respiratoire. Aucune évaluation n'a été faite de la capacité d'avaler de la patiente. Et voilà l'empathie dont fait preuve cette médecin à l'égard d'une malade souffrante et fragilisée par l'âge. Et voilà la reconnaissance qu'elle accorde à la dignité inhérente à tout être humain, quel qu'il soit et dans quelque partie du monde où il se trouve.
La médecin avait eu vent d'un commentaire qu'avait fait l'accompagnatrice sur l'exhaustivité de l'enquête clinique sur les causes de la déshydratation de la patiente quelques semaines auparavant. Après avoir écarté l'insuffisance rénale, le manque d'absorption de fluides permettant une bonne hydratation et l'absence d'infection, la cause médicamenteuse n'avait pas été évaluée. Elle s'était objectée auprès de l'accompagnatrice, s'exclamant qu'elle prenait mal qu'on puisse critiquer la qualité des soins qu'elle prodigue, puis elle s'était esquivée à son poste de travail pour pleurer. Larmes de crocodile? Les médecins urgentologues sont soumis à un stress incroyable, ils sont confrontés à des décisions difficiles qu'ils doivent prendre en toute vitesse souvent lorsqu'ils sont physiquement épuisés. Ils doivent posséder des connaissances pointues sur une multitude d'aspects du fonctionnement du corps humain. N'est-ce pas déraisonnable de s'attendre d'eux qu'en plus, ils soient mis dans une position où, sans formation universitaire appropriée en matière éthique ils se voient mis dans l'obligation de prendre des décisions ayant une portée directe sur l'existence ou la mort d'autrui?  Ce stress incroyable mène sans aucun doute à la perte de decorum professionnel que constitue la crise de larmes lorsqu'on est en fonction d'autorité aux urgences d'un hôpital.
Renvoyer une personne malade âgée sans soulager ses symptômes ni assurer son confort, surtout lorsqu'elle est mise sous soins palliatifs, soins visant à assurer le confort du patient, n'équivaut pas à donner un soin de qualité.  Une fois son intervention terminée, la médecin n'a pas fait le nécessaire pour assurer le suivi de la patiente par les services infirmiers des soins palliatifs. Elle s'est bornée d'adresser un léger sourire victorieux à l'accompagnatrice.
Hippocrate aurait été fier de sa prestation.

vendredi 15 mars 2013

Une liste bien utile pour rester en vie - A Useful List To Stay Alive

Que vous vous approchiez de la soixantaine ou que vous vous préoccupiez du bien-être d'une personne âgée, il faut que vous sachiez que certains médicaments sont à proscrire à compter d'un certain âge à cause de leur nature potentiellement dangereuse sur la santé et qui peuvent éventuellement mener à une mort prématurée.
Whether you are nearing the sixties or you are caring for the well-being of an elder, you need to know that certain drugs should not be prescribed after a certain age because of their potentially dangerous effect on health which could lead to a premature death.

Combien de fois ai-je dû me battre avec acharnement pour empêcher que ne soient prescrits des médicaments potentiellement nocifs à ma mère. Je suis donc taxée d'être intransigeante, ce qui n'est pas loin de la vérité lorsqu'il est question d'euthanasie passive. Souvent, dans le feu de l'action, nous acceptons qu'un médicament soit administré et nous nous apercevons lorsque nous avons un moment pour faire la recherche appropriée que ce médicament est dangereux.
How many times did I have to fight ferociously to prevent that my mother receive potentially dangerous drugs, with the result that I have a reputation for being difficult which is not far from the truth when it comes to the subject of passive euthanasia. Often, in the crossfire, you let a drug go by and find out later when you have time to research it that it is not an appropriate alternative because of its dangerous effects.

Notre voisin, âgé certes, vient de décéder. Il souffrait de troubles cognitifs liés au vieillissement. D'un tempérament naturellement fougeux, il lui restait une force physique imposante. La colère qu'il ressentait face à sa maladie d'Alzheimer, la frustration qu'il éprouvait face à cette prison qui se resserait autour de lui comme un éteau le portait à devenir agressif. Pour calmer son agitation, on lui a prescrit du Seroquel. Or, une simple recherche dans Internet mène à la page de monographie du produit publiée par le fabricant... le premier paragraphe se lit ainsi :
Our elderly neighbour has just passed on. He suffered from cognitive impairments related to his age. Naturally overeactive, he was still strong physically. The anger he felt towards the Alzheimer disease he suffered from and the prison that was increasingly limiting him made him aggressive. To calm his agitation, he was prescribed a drug called Seroquel. A simple research on Internet leads to the front page of the drug information published by the drug company... the first paragraph reads as follows :

Important Safety Information and Indications for Seroquel XR and Seroquel

Elderly patients with dementia-related psychosis (having lost touch with reality due to confusion and memory loss) treated with this type of medicine are at an increased risk of death, compared to placebo (sugar pill). Seroquel XR and Seroquel are not approved for treating these patients.

traduction libre :

RENSEIGNEMENTS IMPORTANTS SUR LA SÉCURITÉ ET INDICATIONS À L'ÉGARD DE SEROQUEL XR ET SEROQUEL 

Les patients âgés souffrant de psychose liée à la démence (perte de contact avec la réalité occasionnée par la confusion et la perte de mémoire) traités à l'aide de ce type de médicament présentent un risque accru de mortalité en comparaison avec un placebo (comprimé de sucre). Seroquel XR et Seroquel ne sont pas approuvés pour le traitement de ces patients.

Comment nous prémunir contre ces professionnels de la santé qui s'arrogent directement ou indirectement le droit fondamental qui nous revient de décider de notre mort en prescrivant des médicaments qui ont le potentiel de nous enlever la vie? Il faut s'informer, tout simplement et être préparés. L'American Geriatrics Society a publié une liste de médicaments potentiellement nocifs pour les personnes âgées, le Beers Criteria. Ils mettent cette liste à disposition des professionnels de la santé et du public en général à l'url suivant :
How can we prevent health professionals who take it upon themselves directly or indirectly from robbing us of our fundamental right to decide on our death by prescribing drugs that have the potential of killing us? We simply have to be informed and prepared. The American Geriatrics Society has published a list of potentially inappropriate medication for the elderly, the Beers Criteria. This list is available to health care professionnals and the public at large at the following URL:

https://www.dcri.org/trial-participation/the-beers-list/

Imprimez-la et apportez-la avec vous chez le médecin ou à l'urgence.
Print this list and bring it with you to your doctor's office and at emergency.