dimanche 11 novembre 2007

Jour du Souvenir

Champ de coquelicots, Argentueil
Claude Monet

In Flanders Fields
John C. McRae

In Flanders fields the poppies blow
Between the crosses, row on row,
That mark our place; and in the sky

The larks, still bravely singing, fly

Scarce heard amid the guns below.


We are the Dead.
Short days ago

We lived, felt dawn, saw sunset glow,

Loved and were loved, and now we lie
In Flanders fields.


Take up our quarrel with the foe:

To you from failing hands we throw

The torch; be yours to hold it high.

If ye break faith with us who die

We shall not sleep,
though poppies grow
In Flanders fields.

Comme il arrive souvent dans la vie, j'ai mieux connu mon père après qu'il fut décédé. Homme grand, élancé, d'allure racée, il était peu loquace. Sa fleur préférée était le pavot rouge et, dans notre jardin, à tous les printemps, elle fleurit à profusion.

Il m'arrive souvent de trouver fortuitement sur le sol, aux alentours du Jour du Souvenir, ces petites fleurs rouges en feutre que l'on arbore pour commémorer les anciens combattants. À chaque fois, je souris en me disant. Tiens, Papa est là.
k
J'ai commencé à comprendre qui était mon père et quel était son code d'honneur - car s'il est un mot qui le définit bien c'est celui-là, honneur - en voyant le film Un hussard sur le toit, d'après le roman de Jean Giono. Tout comme Angelo, mon père était officier dans un régiment de hussards dont la devise était Honi soit qui mal y pense, la même que celle de l'Ordre de la Jarretière créée par Édouard III. Papa était éclaireur et, par le jeu du destin, il avait été retenu en Angleterre le 6 juin 1944, jour de débarquement en Normandie. Quand il débarqua, le lendemain, il dut passer par Caen. De ces années de guerre, rien ne fut jamais dit sauf de dire qu'il n'en parlerait jamais. Et jamais, bien qu'il fut en Europe maintes fois après la guerre, jamais n'a-t-il voulu remettre les pieds en Normandie, en Belgique, en Hollande ou en Allemagne.
j
Comment un homme sensible, bon et droit, ayant vécu l'horreur et l'enfer que fut la seconde guerre mondiale, a-t-il pu vivre sa vie auprès de nous sans jamais trahir le serment qu'il s'était fait de nous protéger de ce cauchemar? Il n'en a tenu qu'à son sens de l'honneur et à sa très grande pudeur.
k
Papa s'est éteint un 6 juin, quarante-cinq ans plus tard. Ce 6 juin 1944, le destin lui avait accordé un sursis et il l'utilisa pour revenir épouser la femme qu'il aimait, qui l'avait attendu patiemment durant toutes ces longues années de guerre, et pour fonder une famille qu'il a chéri et servi loyalement.
k
Souvent quand nous, les enfants, étions impossibles et nous querellions, un soupçon de frustration s'éveillait en lui et il nous disait, sur un ton exaspéré : Mais Bon Dieu! Ne pouvez-vous donc pas vous entendre? Nous avons tout pour être heureux!
j

10 commentaires:

Anonyme a dit...

J'avais aussi un père magnifique,quelle chance nous partageons toi et moi,malgré un chagrin et un manque jamais éteints!

Rosa's Yummy Yums a dit...

Un magnifique billet. Ton père était quelqu'un de bien...
Mon arrière-grand-père aussi n'a jamais parlé de ce qu'il avait vécu dans les tranchées en France en 1918. Un vrai secret qu'il emporta avec lui!

Bises,

Rosa

Anonyme a dit...

Un hommage très fort et vibrant pour ton papa. Ses yeux doivent briller d'émotion tout là-haut en lisant ton message d'amour.

Anonyme a dit...

Charmant ce billet et un hommage à ton père c'est touchant!

Anonyme a dit...

Bonjour Louise,
on trouve parfois des blogs purement par hasard, en ce laissant voguer de liens en liens jusqu'à ne plus savoir comment on est arrivé là...
c'est le cas pour votre blog, est-ce le chat bleu, qui m'a fait cliquer sur une interminable liste de liens de recettes de cuisine ?, sans doute
et comme tous les chats bleus finalement se complètent et se ressemblent, je me permet de vous transmettre le lien d'un autre blog de chat bleu....qui n'est pas le mien mais celui d'une amie

http://lelivredelucas.blogspot.com/

Ps : j'aime aussi beaucoup vos recettes et votre manière d'écrire.
le noune

Anonyme a dit...

Jabellik... oui, j'ai été choyée.
Rosa... c'était difficile pour eux de survivre avec l'horreur de ces deux guerres... que dis-je?! de toutes les guerres.
Mijo... merci.
Miss Lola... merci, aussi.
La noune... Merci pour ce lien vers le blogue qui raconte l'histoire de Lucas. C'est percutant d'actualité dans un monde où l'entraide et la sympathie se font de plus en plus rares... il nous incombe de veiller.

lena sous le figuier a dit...

Louise, c'est très beau et très émouvant; IL est toujours là, notre mémoire y veille.
Bises

Anonyme a dit...

Très joli billet, un bel hommage à ton papa !

Gracianne a dit...

Louise, je suis contente que le destin l'ait bloque en Angleterre, qu'il ait pu rentrer et se marier. Tous les ans en juin, j'ai la gorge serree au moment des commemorations. Toutes ces croix blanches...

Anonyme a dit...

Là est le destin des êtres humains... ils se prolongent dans la mémoire des survivants, Léna.
Merci, Églantine